vendredi 5 octobre 2007

l'engrenage


En 2007, faire un séjour de plusieurs mois à l’autre bout du monde s’avère certes une chance inouïe, une expérience exceptionnelle, mais elle n’est plus nécessairement originale. Les blogues non plus, d’ailleurs, ça tombe bien.
Je commence à envisager sérieusement de quitter le pays depuis trois mois. En trois mois, j’ai appris à quel point vous étiez nombreux à avoir laissé vos traces en Inde ou au Vietnam, vous ou vos cousines, vos meilleurs chums, vos pères, vos collègues de travail. Tous vos récits, recueillis devant le Passeport en fumant une cloppe, chez l’optométriste, en se croisant au Wok and Roll coin St-Denis et Rachel, ont créé un torrent puissant qui m’ont entraîné vers mon rêve, quand j’avais l’impression de nager toute seule, en p’tit chien mouillé. J’ai réussi à cueillir de nombreux indices grâce à toutes ces petites coïncidences qui se sont accumulées à la vitesse de l’éclair, avec une convergence presque mystique. Mettons naïvement mais joliment tout ça sur le dos de la synchronicité. La synchronicité, c’est un peu quand on fait un pas vers la réalisation de ses rêves, et que paf, les opportunités, les conseils, les indications nous tombent dessus, par hasard. Comme si nous déclenchions un engrenage par enchantement, ou mieux encore, comme si nous en faisions partie, de la manière la plus naturelle et fluide qui soit.
Je me suis achetée du thé chaï (concept) la semaine passée. Même chez Provigo, il y en avait, genre, dix-huit variétés bio, j’ai pris le forfait découverte. La boîte a traîné sur le comptoir de la cuisine pendant une journée ou deux (ça arrive, je suis parfois trop vedge pour ranger mes produits non-périssables dans l’armoire), et à un moment donné, l’illustration sur le dessus me frappe : c’est un Indien, avec turbant et drapeau, sur le dos d’un éléphant arbre-de-Noël-les-deux-yeux-dans-le-même-trou. Arrière-plan : le Taj Mahal, bien sûr, avec quelques mouettes. Je suis dans une zone un peu touchée parce que je sais pas exactement si c’est un dessin super iconographique d’un grand artiste du huitième siècle avant J.-C., ou une caricature immonde. En tout cas, ça me fait le même effet que si j’avais vu, sur une cannette de sirop d’érable, l’image d’un bûcheron en chemise carrottée qui serre la main à un Amérindien qui porte un poulailler sur la tête. Je me dis surtout qu’il y a cinquante ans, on devait peut-être s’imaginer l’Inde comme étant tout à fait fidèle à cette illustration. Comme certains Français (nous ne les nommerons pas) ont dû penser que nous vivions tous dans des tantes en écorces d’épinette et nous nourrissions de phoque cru.
Le point EST (finalement) : c’est merveilleux de vivre un tel rush d’ouverture entre les cultures. Si beaucoup de patterns horribles ont persisté à travers les siècles, cette ouverture sur le monde, au-delà du Made in China, est une première historique. Nous en faisons maintenant partie, que nous le voulions ou pas. Partir découvrir le monde à vingt ans deviendra un classique avant la prochaine génération (à bien y penser, c'est peut-être même déjà le cas).
J’ai décidé de raconter mon voyage quand même, parce que le monde reste GRAND, trop grand pour que nous le voyions tous de la même façon. Tout le monde pourrait vous raconter sa première journée à la maternelle, sa crise d’adolescence, sa première blonde, son premier deuil, les récits seraient tous différents, et probablement tous intéressants. Ce sont des situations où l’inconnu frappe en pleins genoux, rend complètement vulnérable, oblige une entière soumission. Soumission dans le sens de : on ne s'en tire indemne qu'en lâchant prise, un peu. C’est comme quand je faisais du ski (le vertige est venu avec l’âge) et mon père me disait : Geneviève, si tu prends de la vitesse et que tu as peur de te casser la marboulette, laisse-toi tomber dans un coin. C’est pas trop grave avoir les foufounes pleines de neige, ça va faire moins mal que si tu t’écrapoues en bas. Discutable dans plusieurs situations. Applicable dans le cas du voyage à venir : je vais affronter plein de choses, le ridicule, en particulier. On va rire de moi quand je vais essayer de me commander une soupe tonkinoise et que, à cause des mauvaises intonations, je vais baragouiner un paquet de niaiseries inimaginables sans m’en rendre compte. Ou encore commander quelque chose de... vraiment wierd. La solution à cela ne sera pas d'assomer les rieurs à grands coups de chaises, cela va de soi. Il va falloir que j'accepte d'être risible, comme on accepte d'être poche en ski.
Ça doit faire partie du fun.
…j’imagine.

2 commentaires:

Unknown a dit…

je dévierge tes commentaires. BANG. x&x.

-p.

Unknown a dit…

ben pour avoir lu en diagonnale, disons que j'avais lu en diagonnale, mais pas à peu près!
J'ai bien hâte de lire la suite...